Habitant du siècle numéro vingt et un, il me faut ton avis avisé. Voilà. J’ai toujours souffert de ramassite chronique mais je me demande si ce n’est pas en train d’empirer.
– Tu le manges pas, ton sucre ?
– Euh… nan.
– Ça t’embête pas si je le prends ?
Ma Nadia, un rien surprise, dit que bien sûr que non, mais dans son regard qui suit ma main avec exorbitement, je lis qu’heureusement qu’on se connaît depuis environ mathusalem. Tant pis. Je me saisis du précieux sachet bleu posé sur le bord de sa tasse à café et l’empoche avec une satisfaction que je dissimule difficilement.
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Eh oui. T’as remarqué ? Je peux pas m’en empêcher, je ramasse tous les petits trucs qui traînent. Mon côté vert-développement-durable. Enfin, c’est ce que je me plaisais à penser jusqu’ici. Mais est-ce que c’est aussi bénin ? Par exemple, impossible d’abandonner à l’hôtel les jolies petites bouteilles d’échantillons de shampooing ou sur le plateau-repas en plastoc que vient de me servir l’hôtesse de l’air la lingette nettoyante (et le sucre en poudre) si je ne m’en suis pas servie. Pour que ça finisse à la poubelle ? T’es pas un peu marteau ? Avec ce joli emballage aux couleurs d’Air Portugal ? Direct in ze pocket, sous le regard goguenardo-honteux de mon Jicé.
Sisyphe glucidique du siècle numéro vingt et un
Niveau sucre, c’est depuis que j’ai arrêté d’en prendre dans le café que c’est devenu critique. Avant, je le versais dans ma tasse, on n’en parlait plus. Maintenant, qu’est-ce que tu veux, bien obligée, je collectionne. Il y en a toujours trois-quatre en plus ou moins bon état au fond de mon sac à main. Et tu verras, quand tu viendras prendre le café à la maison, j’en ai de toutes les couleurs dans un bocal, c’est trop joli. Car précisons que je ne thésaurise pas : les invités et autres héritiers consomment ma collec au fur et à mesure que je la constitue. Je suis une sorte de Sisyphe glucidique du siècle numéro vingt et un.
Comme pas mal de mes tares, cet antigaspisme forcené est une malédiction familiale, je soupçonne. Un truc hérité de mamie de Perpezac-le-Noir (Corrèze), à qui deux guerres et une enfance paysanne à la dure avaient enseigné à coups de pied au fondement l’art de la récup. Paquets cadeaux défroissés, ficelles de rôti lavées et remises bout à bout en pelote, couches-culottes jetables rincées, séchées sur fil à linge et illico remises dans le circuit si elles n’avaient subi qu’un petit pipi : la passion grand-maternelle du recyclage ne connaissait guère de limites.
Deux générations plus tard, on jette les ficelles de rôti, merci. Mais pas l’eau qui reste dans les verres quand on débarrasse la table. On la verse aux plantes de la cuisine. Qui ont intérêt à avoir soif. Yen a qui se noient.
Et Mme Zaz le clébard a droit à tous les restes, en dépit du veto du véto (tu noteras la subtilité orthographique veto, véto), qui raconte que c’est mauvais pour elle. Oui, mais jeter le gras du jambon et l’os de la côte de porc, c’est mauvais pour mon ulcère à moi : ça m’angoisse.
Alors voilà : un épouvantable doute m’étreint. Serais-je avaricieuse ? Ou, pire, psychoticonévrosée ? A l’évidence, la maladie s’aggrave, puisqu’elle s’étend désormais aux tasses et plateaux de mes voisines et zins. Tiens, Brigitte, au fait, vous le mangez pas, votre sucre ?
Allez, habitant du siècle numéro vingt et un, pense à moi en sirotant ton café en terrasse, et surtout, n’oublie pas de me garder ton sucre. Tu me feras un petit colis pour Noël. D’accord ?
Chronique T’as remarqué, en direct sur France Inter chaque lundi à 5 h 50, dans la joyeuse émission de Brigitte Patient, Un jour tout neuf.
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© Muriel Gilbert
HELLO
moi je fais dans lutile je garde le ketchup et la mayo de mac do!! pour les pic nique ou bien les gamelles pour le boulot!!
en tout cas tu est consciente de ce que tu fais ce n’est pas grave alors!
bises
moi aussi j e suis » madame je-ne -jette-rien….serait-ce un toc, ?ou une maladie..ou signe d’économie…en me disant: » on ne sait jamais , cela peut toujours servir!!!
Puisque plus personne dans mon foyer ne sucre ses boissons, je ramasse quand même les sucres et je les refile à un collègue, pour sa femme. Pas de gaspi ! http://blogs.mediapart.fr/files/chasse-au-gaspi-2.jpg
Moi z’aussi, je suis un maniaque de la récup’. Je fais même les poubelles: mon armoire de toilette, mon micro-onde, mon fauteuil-hyper-dizaïne, mes rideaux, mon clavier USB, etc. viennent des poubelles. Chez mes pépé-mémé, il y avait un seau cabossé et une vieille pelle à charbon pour ramasser le crottin ->jardin, engrais gratos! On ne lutte pas contre l’atavisme. Je suis génétiquement écolo-clodo.
Tu as raison Muriel, c’est l’avenir. Moi même quand j’ai le téton qui goutte un peu entre 2 tétées j’en profite pour me faire un tea time : earl grey nuage de lait 🙂 sans sucre pour moi merci !
mais c’est exactement l’attitude qu’il faut avoir,crise ou pas.Je le fais systématiquement.
pareil pour le sucre , les échantillons à l’hôtel, les touillestouilles du café (ouais c’est grave ça …) les sauces du mac do, les huiles des pizzas, et le pire … avant on allait chez une dentiste qui mettait à disposition des brosses à dents pré-dentifricée (ouais j’invente des mots)… du coup, le tiroir de la salle de bain était blindée de brosse à dents … Un truc grave aussi, quand je vais dans un magasin ou dans une salle d’attente, je ne peux pas m’empêcher de rendre les cartes de visites qui sont posées sur les comptoirs… j’ai une boite à chaussures pleines de cartes de visites de je ne sais même pas qui … O_o
Moi aussi je garde les sucres, le petits chocolats et les petits gâteaux qui sont sur les bords des tasse ….. 😉
« s » [c’est celui qui manque à « tasse »]
Ma foi c’est pas bien grave comme toc !!! Mon fiston récup’ tout garde les protection des rasoirs par exemple (cet enfant m’inquiète parfois !!)
Un club, une assoc’, même anonyme, je vois que ça, parce que c’est itou ici-bas. Les sauces dans les fast-food, les petits chocolats, le vin pas bu au resto (bon, c’est un peu encombrant et bruyant dans le sac, surtout quand on t’as gentiment dit oui quand tu as demandé « et le magnifique cendrier, je peux le prendre? ») et j’en passe et des pas mûres.
C’est plus un truc de petite fille qui aime les mini-trucs ça non ? Mini-sucre, mini-gâteau, mini-gel douche, mini-shampooing…
Je n’ai jamais eu ça, mais je le regrette, c’est charmant et ça fait vertueux comme toc, ce qui n’est pas si fréquent. Depuis peu, j’adore jeter ou donner ce qui traîne d’inutile chez moi, mais je crois que c’est parce que j’ai perdu tellement de choses en déménageant que ça a un côté exorcisme: un peu plus, un peu moins, là au moins c’est moi qui choisis ce qui disparaît!
@ MissRelie : J’apprécie ton absolution, ainsi soit-il !
@ Charlotte : C’est ça ! Ca peut toujours servir, j’en suis sûre moi aussi.
@ Anna : Et tes invités ?
@ Marc : Ah oui, le crottin ! Chez mes grands-parents, on récupérait le… crottin disons humain pour engraisser les champs. Saveur garantie.
@ FoxyMama : Et tu sers un nuage de lait à tes invités aussi ?
@ Marykos : Dans mes bras !
@ Fr@mboize : Les cartes de visite, non, là je crois que tu nous bats tous. Chapeau bas, Fr@mboize.
@ Béatrice : Les petits gâteaux… je les MANGE !
@ Poulette : Et tu verras quand il se rasera, ça devrait empirer 😀
@ Zette : Ouf, les cendriers j’ai arrêté en arrêtant de fumer. Oui, créons un clube.
@ Dame Petunia : C’est ça. c’est mon côté pas mûr.
@ Fabienne : Tiens, moi j’aimerais bien avoir un toc de jetage. Ca me ferait de la place !
Oui, c’est ça!! Même patho!!! J’ai même réussi ç embarquer mes copines ds ma névrose!!! Elles me récupère aussi les sachets de sucre! Bon je sucre plus rien depuis belle lurette mais mes collègues de boulot sont toutes contentes quand je sors mon petit sachet de sucre au moment du café!! Chouette, je ne suis plus seule!!!!
@ Francine : J’espère bien avoir réussi moi aussi à convaincre quelques lecteurs de me garder leurs petits sucres. Je suis postée à la boîte aux lettres.
Mu-lautre, moi je dis, tu viens de lancer une mode : l’antigaspisme ! Je l’adopte illico…
@ Mulautre : Déjà que tu avais adopté mon prénom…
Il y a une dizaine d’années alors que j’étais encore jeune, je récupérais les couverts des plateaux-repas livrés lors des réunions. Je trouvas inadmissible que l’on puisse jeter ces éléments qui serviraient un jour, probablement. Aujourd’hui, ils servent, ce sont les ceux des enfants, ravis d’avoir une dînette à la taille de leurs pognes…
Evidemment, ma récupérite aiguë s’étend toujours au sucre, sel et autres condiments, tout comme je conserve les petites fioles de produits lavant lorsque je séjour, exceptionnellement, à l’hôtel. Lesquels sont rarement utilisés car propres (sic) à dessécher toute parcelle de peau recouverte.
Sinon, ça se soigne la récupérite ?